Le Facteur Podal

Le Facteur Podal

Le Facteur Podal

Un ostéopathe, un dentiste , une orthoptiste et un podologue: voici quelques spécialités du monde médical qui, à priori, n’ont pas grand chose à se dire. Voilà ce que nombre de gens peuvent penser actuellement, y compris ceux issus de ce même monde médical.
Dès le XIXème siècle, on découvre le rôle des capteurs qui permettent à l’homme de se tenir debout (le facteur podal). Les yeux par Romberg, le vestibule par Florens, la proprioception des muscles paravertébraux par Longuet, le sens musculaire par Sherrington, l’oculomotricité par De Cyon.

Intérêt de l’approche pluridisciplinaire en posturologie clinique

D’après P.M. Gagey: « l’homme se tient debout automatiquement grâce à un système de contrôle très fin. »
Alors, chaque thérapeute dans son cabinet qui écoute son patient se plaindre de rachialgies, d’instabilité, de céphalées ou de migraines alors que tous les examens en radiologie, neurologie, otoneurologie sont normaux, doit se demander, comme le souligne P.M. Gagey: « comment il se tient debout?! » L’intérêt de la posturologie prend alors toute son importance. Le patient comprend lui-même la nécessité d’avoir une oculomotricité, une occlusion et des appuis plantaires bien équilibrés.

Il comprend de façon logique que son corps est un tout. Attention, tout ne relève pas de la posturologie ni du facteur podal. Une analyse précise et un examen clinique rigoureux permettront d’orienter ou non son patient vers tel ou tel spécialiste.

Le capteur podal:

Lorsque le podologue étudie le système postural il a bien raison! J’invite d’ailleurs tous mes confrères à faire de même. Pourquoi?
Parce que le pied est un capteur primaire du Système Tonique Postural (STP) avec l’œil et le vestibule. C’est un ensemble proprioceptif et extéroceptif unique qui contient des muscles, des articulations et de la peau.

Le pied possède deux type de capteurs: des récepteurs musculaires et des récepteurs cutanés. Il est donc nécessaire pour réguler la station debout afin de disposer de deux type d’informations.
Sur le plan dynamique, il faut une première information qui nous fournit l’état des commandes, les récepteurs tendino-musculaires et une deuxième dévolue aux récepteurs cutanés.

Sur le plan thérapeutique, on entrevoit immédiatement l’importance de la stimulation sensitive cutanée, en particulier au niveau de la réalisation des semelles.

En clinique, le pied peut se présenter:
– Soit comme « causatif », responsable d’un déséquilibre postural que sa pathologie provoque.
– Ou alors comme « adaptatif », le pied compense un déséquilibre venu du haut.
– Enfin comme élément mixte, à la fois causatif et adaptatif. C’est le cas le plus fréquent en pratique.

Le traitement podologique

Les bases du traitement reposent tout d’abord sur les corrélations qui ont été faites tout au long des différents temps cliniques, ainsi qu’avec les autres spécialistes de « l’équipe soignante ».
La neurophysiologie moderne nous a montré qu’il n’est plus possible de mettre n’importe quoi sous les pieds et notamment sous les pieds des enfants; à long terme, les conséquences insidieuses sont trop graves.

Orthèses plantaires posturales:

Elles n’ont pas pour but de basculer des pièces osseuses mais grâce à des mini reliefs (0,5 à 3 mm) d’enclencher des réflexes de correction.
Selon les auteurs, elles agiraient: « sur la proprioception musculaire du pied entraînant des modifications dans l’activation des chaînes proprioceptives ascendantes ».
En fait, ces semelles sont, avant tout, extéroceptives, elles agissent en priorité sur la peau et secondairement sur les fuseaux neuromusculaires des muscles concernés.

Les semelles orthopédiques classiques:

Elles vont fréquemment du point de vue strictement postural à l’encontre du but recherché.
Leur prescription ne tient pas compte le plus souvent des autres entrées du système postural.

Conseils divers:

Les conseils vont porter sur le chaussage, la hauteur des talons, la présence ou non de voûte, le contrefort de la chaussure, etc.…
Des exercices à faire sur le pied plat de l’enfant.

Conclusion

Cette approche posturale pluridisciplinaire de nos patients va à l’encontre des concepts classiques et des traitements qui en découlent. En effet, tout à coup on se met à traiter les causes et non plus les symptômes.
Lorsque le traitement est correctement suivi, les résultats sont souvent excellents. Les échecs sont liés à un traitement mal compris, mal suivi, aux problèmes psychologiques négligés ou mal résolus, à la non coopération du patient liée à l’incompréhension de ce concept.
Les problèmes que pose cette approche posturale sont nombreux et le champ de recherche reste considérable: organisation et adaptation du système postural, hiérarchie des capteurs, mode d’action des orthèses plantaires…
A la fois d’un point de vue scientifique mais aussi d’un point de vue législatif, le problème reste entier. Car l’un ne va pas sans l’autre, et si la posturologie commence à montrer le bout de son nez à la Faculté de Médecine, il faudra encore quelques temps pour que la reconnaissance de cette discipline soit complète. C’est à nous, praticiens, à nous y employer!!

 

François MILLAS
Podologue D.E.